Objectif 85 - septembre 2016
Crises et changements
Extrait de la mosaïque dite « calendrier des activités rurales » : tableau XXIII, les vendanges
La politique agricole est un défi particulier pour tous les Etats mais aussi pour toutes les époques, que la situation économique soit favorable ou non. Les guerres remportées par le SPQR1 provoquent un tel afflux de richesses, que 167 avant notre ère sonne le glas de l'imposition directe des citoyens en Italie. C'est aussi l'arrivage massif de céréales peu chères et son corollaire, l'effondrement des prix. Durant les deux années qui suivent la la main-mise totale de Rome sur la Méditerranée2, les prix sont divisés par 8. Puis la concurrence se fait sentir sur les produits à plus forte valeur ajoutée, le vin et l'huile d'olive. Les paysans « quittent un à un le pays, pour s'en aller gagner leur vie, loin de la terre où ils sont nés ».3 La concentration des terres privées et publiques atteint un tel niveau que la réforme proposée par les frères Gracchus ne prévoit un plafonnement des terres publiques4 que de 125 hectares par chef de famille et redistribuer les terres ainsi récupérées aux paysans pauvres par lot de 7,5 hectares.5 Une réforme même raisonnable reste une réforme et elle se heurte à une forte résistance de l'aristocratie : les deux frères se suivent dans la tombe.
Au niveau agraire, les législateurs réformistes démocratiquement élus ne rencontrent pas toujours un franc succès. La voie de la tyrannie a parfois connu meilleure fortune. Pisistrate, tyran d'Athènes au cours du VIe siècle avant notre ère, confisque et distribue les terres de l'aristocratie et encourage l'investissement dans les plantations de vignes et d'arbres fruitiers par des crédits d'état à faible intérêt. Lui ne fut pas assassiné6. C'est l'Âge d'or des petits et moyens propriétaires que chante Xénophon dans son Economique.7
Mais l'Age d'Or se rencontre toujours plus dans le livres que dans les champs.
1 C'est-à-dire le Sénat et le peuple romain (Senatus Populusque Romanus). Emblème de la République, puis de l'Empire, il représente le pouvoir politique romain. On le retrouve toujours sur le blason de Rome, les ouvrages publics de la ville et... les bouches d'égouts.
2 Soit deux ans après la prise et la destruction du rival carthaginois en 146.
3 Jean Ferrat, La Montagne, mais Hésiode, poète grec du VIIIe siècle avant notre ère, aurait pu le chanter dans Les Travaux et les jours.
4 Ces terres publiques, Ager publicus dans le texte, sont des terres en Italie dont le peuple romain est propriétaire mais qui est exploité par des privés contre une taxe. Cela n'a pas empêché la constitution de domaines latifundiaires.
5 Rome et son empire, M. Christol et D. Nony, Paris, Hachette, 1990, 288 p.
6 Le monde grec antique, M.-C. Amouretti et F. Ruzé, Paris, Hachette, 1990, 320 p.
7 « Depuis longtemps je dis que l'agriculture est art débonnaire, si ami de l'homme, que, pour peu que l'on entende et voie, on y devient habile. C'est elle-même qui nous enseigne la manière d'obtenir les plus grands succès; et, pour le prouver tout de suite, la vigne, en grimpant sur un arbre voisin, n'enseigne-telle pas à lui donner un appui? » Xénophon, L'Economique, Livre XIX.
2 Soit deux ans après la prise et la destruction du rival carthaginois en 146.
3 Jean Ferrat, La Montagne, mais Hésiode, poète grec du VIIIe siècle avant notre ère, aurait pu le chanter dans Les Travaux et les jours.
4 Ces terres publiques, Ager publicus dans le texte, sont des terres en Italie dont le peuple romain est propriétaire mais qui est exploité par des privés contre une taxe. Cela n'a pas empêché la constitution de domaines latifundiaires.
5 Rome et son empire, M. Christol et D. Nony, Paris, Hachette, 1990, 288 p.
6 Le monde grec antique, M.-C. Amouretti et F. Ruzé, Paris, Hachette, 1990, 320 p.
7 « Depuis longtemps je dis que l'agriculture est art débonnaire, si ami de l'homme, que, pour peu que l'on entende et voie, on y devient habile. C'est elle-même qui nous enseigne la manière d'obtenir les plus grands succès; et, pour le prouver tout de suite, la vigne, en grimpant sur un arbre voisin, n'enseigne-telle pas à lui donner un appui? » Xénophon, L'Economique, Livre XIX.
