Objectif 83 - août 2015
Vae victis !
"Un pressoir à torsion figurant dans la tombe du gouverneur de province Khety à Beni Hassan, ensemble de sépultures datant du Moyen-Empire.
Aux origines de la viticulture dans le Proche-Orient, on se contentait d'écraser le raisin et de faire fermenter le jus dans des jarres. Dans l'Egypte du IIIe millénaire, on utilise des pressoirs à torsion. Il s'agit d'un sac en tissu rempli de marc qui venait d'être foulé avec les pieds. Une fois plein, il était fermé à ses deux extrémités avec de forts bâtons que quatre hommes tordaient en sens contraire. Si ces procédés de vinification nous sont connus par les peintures des mastabas2 de Saqqarah3, le temps vient à bout de nombreux vestiges vinaires et les sources écrites, iconographiques ou archéologiques ne donnent pas une vision homogène tant les conservations peuvent être inégales, les remaniements fréquents et les informations implicites ou lacunaires.
Des monuments4 bien plus solides n'ont pas été épargnés par les siècles et l'Histoire, souvent violente. Le Parthénon avait bien résisté à sa transformation en église mais lors de la « Querelle des images »5, de nombreux pans de ses frises furent détruits. Suite à la conquête d'Athènes par les Ottomans, l'église devient mosquée. C'est lors de la Guerre de Morée6 que son naos7 est utilisé comme poudrière et qu'une attaque de mortier par les Vénitiens le fait exploser. De nombreux débris seront ensuite utilisés pour la reconstruction de la ville ou ramenés comme souvenirs par des touristes occidentaux8.
Les conflits sont de tout temps source de destruction soit par prise de guerre soit suite au pillage par la population locale. Aujourd'hui encore, de nombreuses pièces témoignant des civilisations qui nous ont précédès se retrouvent au marché noir, marché destructeur de mémoire9, où la Suisse joue son rôle. Avant 2005, aucune loi helvétique ne réglementait le transfert des biens culturels, et de nombreuses pièces transitent toujours par l'opaque port franc de Genève, tristement célèbre dans les affaires de trafic de biens archéologiques.
Le patrimoine viticole de Lavaux semble à l'abri mais sa préservation est essentiellement assurée par les amateurs de ses nectars...
Des monuments4 bien plus solides n'ont pas été épargnés par les siècles et l'Histoire, souvent violente. Le Parthénon avait bien résisté à sa transformation en église mais lors de la « Querelle des images »5, de nombreux pans de ses frises furent détruits. Suite à la conquête d'Athènes par les Ottomans, l'église devient mosquée. C'est lors de la Guerre de Morée6 que son naos7 est utilisé comme poudrière et qu'une attaque de mortier par les Vénitiens le fait exploser. De nombreux débris seront ensuite utilisés pour la reconstruction de la ville ou ramenés comme souvenirs par des touristes occidentaux8.
Les conflits sont de tout temps source de destruction soit par prise de guerre soit suite au pillage par la population locale. Aujourd'hui encore, de nombreuses pièces témoignant des civilisations qui nous ont précédès se retrouvent au marché noir, marché destructeur de mémoire9, où la Suisse joue son rôle. Avant 2005, aucune loi helvétique ne réglementait le transfert des biens culturels, et de nombreuses pièces transitent toujours par l'opaque port franc de Genève, tristement célèbre dans les affaires de trafic de biens archéologiques.
Le patrimoine viticole de Lavaux semble à l'abri mais sa préservation est essentiellement assurée par les amateurs de ses nectars...
1 Malheur aux vaincus ! Cette phrase est attribuée au chef gaulois Brennos, après sa victoire contre Rome en 386 avant notre ère. Elle rappelle aujourd'hui que le vaincu est à la merci du vainqueur, surtout pendant les négociations qui suivent le comba
2 Edifice funéraire égyptien.
3 Vaste nécropole de la région de Memphis, au sud du Caire dans le delta du Nil.
4 Du latin monere : faire songer à quelque chose, faire souvenir.
5 Cette expression désigne la période iconoclaste de l'histoire byzantine (723-843) : les empereurs byzantins interdirent le culte des icônes et firent détruire systématiquement les images représentant le Christ ou les Saints. Cette absence de représentations matérielles du monde naturel et surnaturel, l'aniconisme, semble avoir la capacité de s'épanouir dans différentes religions monothéistes..
6 1684-1699 : une des étapes de la guerre vénéto-ottomane.
7 Le naos est la pièce la plus importante d'un temple de l'Egypte antique, de la Grèce antique ainsi que des églises orthodoxes. On l'appelle aussi le « Saint des Saints ».
8 Sans même mentionner le vol des frises du Parthénon, aujour d'hui exposées au British Museum , commandité par Lord Elgin, ambassadeur de Grande-Bretagne auprès du Grand Mufti de Constantinople dès 1798. Comme le dit Lord Byron, « il a fallu que [ce] pays envoya ici un spoliateur qui les surpassât tous ».
9 Laurent Flutsch, Didier Fontannaz, Le pillage du patrimoine archéologique, Lausanne, Favre, 2010.
